Rubayat, par Omar Khayyâm, quatrains XCI à C
Un article de Caverne des 1001 nuits.
XCI
Conviction et doute,
Erreur et vérité,
Ne sont que des mots aussi vides qu'une bulle d'air.
Irisée ou terne, cette bulle est l'image de ta vie.
XCII
À la puissance de Kaï-Kaous, à la gloire de Kai-Kobad,
Aux richesses du Khorassan, je préfère une urne de vin.
J'estime l'amant qui gémit de bonheur,
Et je méprise l'hypocrite qui murmure une prière.
XCIII
Écoute ce grand secret.
Quand la première aurore illumina le monde,
Adam n'était déjà qu'une douloureuse créature
Qui appelait la nuit, qui appelait la Mort.
XCIV
La lune du Ramazan vient d'apparaître.
Demain, le soleil baignera une ville silencieuse.
Les vins dormiront dans les urnes
Et les jeunes filles dans l'ombre des bosquets.
XCV
Je n'ai pas demandé de vivre.
Je m'efforce d'accueillir sans étonnement et sans colère
Tout ce que la vie m'apporte.
Je partirai sans avoir questionné personne sur mon étrange séjour sur cette terre.
XCVI
Ne laisse pas de cueillir tous les fruits de la vie.
Cours vers tous les festins et choisis les plus grandes coupes.
Ne crois pas qu'Allah tient compte de nos vices ou de nos vertus.
Garde-toi de négliger ce qui peut te rendre heureux.
XCVII
Nuit. Silence. Immobilité d'une branche et de ma pensée. Une rose, image de ta splendeur éphémère,
Vient de laisser tomber un de ses pétales. Où es-tu, en ce moment, toi qui m'as tendu la coupe et que j'appelle encore ?
Sans doute, aucune rose ne s'effeuille près de celui que tu désaltères là-bas,
Et tu es privée du bonheur amer dont je sais t'enivrer.
XCVIII
Si tu savais comme je m'intéresse peu aux quatre éléments de la nature et aux cinq facultés de l'homme !
Certains philosophes grecs, dis-tu, pouvaient proposer cent énigmes à leurs auditeurs ?
Mon indifférence là-dessus est totale. Apporte du vin, joue du luth
Et que ses modulations me rappellent celles de la brise, qui passe comme nous!
XCIX
Quand l'ombre de la Mort s'allongera vers moi, quand la gerbe de mes jours sera liée,
Je vous appellerai, et vous m'emporterez, ô mes amis !
Lorsque je serai devenu poussière, vous façonnerez, avec mes cendres, une urne que vous remplirez de vin.
Peut-être, alors, me verrez-vous revivre.
C
Je ne me préoccupe pas de savoir où je pourrais acheter le manteau de la Ruse et du Mensonge,
Mais je suis toujours à la recherche de bon vin. Ma chevelure est blanche.
J'ai soixante-dix ans. Je saisis l'occasion d'être heureux aujourd'hui,
Car, demain, je n'en aurai peut-être plus la force.
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